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Data et IA: le siècle des lumières numériques?

 

Collecte, stockage, valorisation … A l’occasion de son événement à l’EPFL le 6 février 2020, Softcom a convoqué cinq experts pour débattre des enjeux liés à la donnée et à l’intelligence artificielle.

A chaque décennie, son mot-clé à succès. Dès l’apparition du Big Data au tournant des années 2010, l’économie numérique ne juraient que par ces méga données issues des réseaux sociaux, des objets connectés, de la téléphonie mobile et des capteurs. Pour elle, ce trésor était la promesse d’innovation, mais surtout de nouveaux marchés à conquérir. Les lignes ont un peu bougé en 2020 avec l’avènement de l’IA. L’intelligence artificielle est aujourd’hui sur toutes les lèvres. Cette technologie alimentée par la croissance toujours plus importante de données numériques est promise à révolutionner nos quotidiens d’hommes et de femmes connectés, tant sur le plan économique, éthique et politique que sociétal.

L’intelligence artificielle et les données qui lui servent de carburant sont au coeur des enjeux numériques, car elles posent des questions cruciales jusque dans leur propre définition: qu’est-ce que l’IA, le big data? Quelles sont les finalités de ces technologies? Comment donner du sens à des données brutes? Quid de l’intégrité de ces informations? Quel sera notre avenir et quelle place l’humain pourra-t-il prétendre? Nous pourrions continuer la liste sur plusieurs pages. C’est pour répondre à ces interrogations – et beaucoup d’autres – que Softcom a convié cinq experts de premier plan le 6 février 2020 lors de son événement «Dis Siri, quelle sera la Suisse de demain» organisé à l’EPFL.

Maîtriser ce dont on parle

A l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, Rémi Sabonnadière est un fin connaisseur de la donnée sous toutes ses formes. D’abord pour l’avoir étudiée à l’issue d’un cursus en data science. Mais surtout parce qu’il est aujourd’hui l’un des membres de l’équipe de direction de l’EPFL Extension School. Cette formation continue en ligne accompagne les entreprises dans leur transition numérique. «L’Extension School a été créée avec l’objectif affirmé de permettre à tous profils de métiers de s’armer des compétences nécessaires pour réussir une carrière dans un monde du travail en plein évolution. Les entreprises viennent nous voir parce qu’elle veulent réussir leur transition numérique.»

Pour y parvenir, elles doivent former leurs collaborateurs à ces technologies qui sont bien plus accessibles que beaucoup ne le pensent et apportent de la valeur à tous niveaux. Mais avant d’en arriver là, faut-il encore comprendre le fonctionnement de l’IA et des données: «Pour beaucoup, l’intelligence artificielle sert à la prédiction, souligne Rémi Sabonnadière. C’est-à-dire que cette technologie permet d’expliquer le présent et le futur grâce aux données passées.» Mais la donne change face à leur croissance exponentielle. Car 90% des données produites par l’humanité l’ont été ces deux dernières années. Des données toujours plus nombreuses et variées qui posent de nouvelles questions aux data scientist: comment traiter ce volume, comment naviguer dans la variété des informations, comment faire face à la vitesse de production de nouvelles données, et enfin, existe-t-il des technologies capables de juger de la véracité de ces informations?

L’enjeu du stockage

Selon Liviana Zürcher, scientifique de la donnée chez Microsoft, l’intelligence artificielle est un continent à appréhender. Elle invite les entreprises à faire le premier pas dans ce territoire méconnu, mais synonyme de promesses. Ce n’est que par ce biais que nous serons tous «capables de libérer la puissance des données». Faut-il encore les stocker et les protéger. Microsoft suit la tendance en proposant des solutions de stockage domestique. Avec son service Azure, le géant technologique de Redmond vient d’inaugurer deux centres de données en Suisse. L’un à Genève. L’autre à Zurich. Il offre ses services cloud aux entreprises, aux administrations publiques et aux ONG. L’objectif de ces ouvertures est de proposer aux sociétés et aux administrations suisses de garder leurs données critiques en Suisse tout en profitant des systèmes de réplication entre les deux datacenters afin d’assurer la continuité de services en cas d’incident.

Si la donnée est une matière première, comment lui donner du sens? La jeune entreprise fribourgeoise Swiss-SDI ne confond pas la sciences de la donnée avec le big data. Fondée il y a peu par trois anciens étudiants en mathématiques de l’EPFL, Swiss-SDI préfère puiser dans l’intelligence artificielle des résultats utiles plutôt que d’amasser d’énormes quantités de données. En d’autres termes, l’entreprise a les pieds sur terre en proposant des solutions concrètes adaptées à la réalité et aux forces des entreprises suisses. Selon Xavier Bays, un des fondateurs, la flexibilité et le service sur mesure, en collaboration étroite avec le client, sont plus importants que la complexité des processus d’analyse. Xavier Bays insiste auprès de ses clients sur la nécessité de rester pragmatique, tant sur les buts, que sur la problématique et les outils.

Un profond changement culturel

Le cofondateur de Swiss-SDI rappelle à juste titre que la data science et le data engineering sont deux métiers différents, mais complémentaires. La personne qui collecte, structure et analyse n’existe pas. Xavier Bays ajoute l’importance de la flexibilité. Une palette d’outils et de compétences existent. L’essentiel est de savoir ce que l’on cherche, dans quel but, avec quels moyens et à quelle fin. Si l’entreprise n’est pas au clair sur ces points, elle ne profitera pas des potentialités offertes par l’IA. En d’autres termes, l’intelligence artificielle n’est pas qu’une évolution technologie. Il s’agit d’un véritable changement culturel. Un point sur lequel insiste Blaise Lugeon, Entreprise Architect chez Softcom Technologies.

Selon l’expert, ce n’est pas parce que la technologie existe que les défis sont résolus. Il cite ainsi la dernière étude du cabinet Gartner rappelant que 82% des projets Big Data échouent et que 62% de ces échecs ne sont pas dûs à la technologie, mais à des compétences inadéquates en entreprise. Quelles sont donc les bonnes pratiques? Blaise Lugeon invite les entreprise à penser la donnée de bout en bout, soit de sa production à son partage en passant par son stockage, son anonymisation, son contrôle. Ce changement de culture ne se fait pas tout seul. Il passe par une mise en relation avec l’ensemble des acteurs actifs de près ou de loin avec la science de la donnée. C’est le partage de données, le partage de connaissances et de cas concrets qui va lui permettre d’avancer et de valoriser son travail dans ce nouveau territoire.

La confiance, mère de toutes les batailles

Enfin, il n’y a pas de croissance sans confiance disait François Hollande en 2012. Face à la robolution grandissante de la société, pouvons-nous – en tant qu’individus – faire confiance aux entreprises et aux services à qui nous déléguons une part croissante de nos quotidiens d’hommes et de femmes connectés? La confiance numérique est au coeur de la transition numérique. Philippe Gillet l’a bien compris. Le chef de la sécurité chez Sicpa rappelle l’importance de ne pas oublier que derrière les données dématérialisées, il y a des impacts réels. Qu’ils s’agissent des secteurs de l’agro-alimentaire, de la santé, de l’environnement, de la finance ou du politique, l’usage des données et de l’intelligence artificielle produit des effets concrets. D’où l’importance d’opter pour les bonnes pratiques en amont afin d’éviter les biais. Une exigence pour que la transition numérique ne se tire pas une balle dans le pied.

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